Lettre au Ministère des finances et des comptes publics

Après avoir lancé la pétition #NoTaxOnTampons le vendredi 20 février demandant que la TVA sur les tampons, serviettes et coupes menstruelles passe a minima de 20% à 5,5%, comme pour d’autres produits « de première nécessité » tels que l’eau, les denrées alimentaires ou les préservatifs, voire à 2,1% comme c’est le cas pour les médicaments remboursables par la sécurité sociale, le 04 mars Georgette Sand s’adresse directement au Ministère des finances et des comptes publics pour définir les modalités d’un abaissement de la TVA sur les protections périodiques et est depuis en attente d’un rendez-vous :

 

À l’attention de Monsieur Michel Sapin, Ministre des Finances et des Comptes publics.

Monsieur le Ministre,

L’égalité femmes-hommes constitue un axe essentiel de la politique du gouvernement et des engagements du président de la République au même titre que les problématiques de solidarité et de santé publique.

L’application du taux normal TVA de 20% aux produits de protection périodique féminine constitue, à cet égard, une rupture d’égalité au quotidien, autant qu’un enjeu social et sanitaire fondamental.

Les femmes représentent un peu plus de 51% de la population en 2015, et l’achat de tels produits concerne 43% des Françaises, soit près de 15 millions de femmes chaque année. Les menstruations sont une caractéristique biologique des femmes, entre l’âge de la puberté et celui de la ménopause. L’achat de protections périodiques féminines est à cet égard une dépense contrainte et non un choix. Notre collectif estime que les dépenses liées à ces achats représentent entre 1500 et 2000 euros dans une vie pour chaque femme, ce qui pénalise les personnes les plus précaires et les conduit à opter pour des alternatives non adaptées et potentiellement dommageables à leur santé.

À ce titre, il nous apparaît difficilement compréhensible et justifiable que ces articles ne soient pas classés dans la catégorie des produits de première nécessité, entendus comme des produits de consommation de base, jugés indispensables à la survie des citoyens, auxquels s’applique le taux réduit de TVA.

Aussi, fortes des près de 10 000 signatures qu’a recueillies la pétition lancée par notre collectif le 20 février dernier sur Change.org, nous souhaitons voir reconnus ces produits comme de première nécessité, au même titre que l’eau, les denrées alimentaires de base, les équipements et soins pour personnes en situation de handicap ou les médicaments remboursés par la Sécurité sociale, en portant le taux applicable de TVA d’abord à son niveau réduit de 5,5%, voire ensuite au taux super-réduit de 2,1%.

Selon nos estimations, un tel changement entraînerait de nombreux avantages. Tout d’abord, le bénéfice politique est évident : plus de la moitié de la population française sera un jour concernée par la réforme. Ensuite, il représente un supplément de pouvoir d’achat annuel de près de 10 euros par femme. Enfin, son coût pour les finances publiques apparaît limité : moins de 0,1% du produit annuel de la TVA, soit entre 130 et 160 millions d’euros, qui pourrait être compensé par le relèvement du taux applicable à une catégorie de produits non nécessaires, voire dommageables en terme de santé publique (comme le foie gras ou les boissons gazeuses, auxquels est appliqué un taux de 5,5%).

Notre demande intervient en amont du calendrier budgétaire, avant l’élaboration des documents budgétaires des mois de juillet et août, afin que cette mesure soit prévue au projet de loi de finances pour l’année 2016. Il va sans dire que le fait de l’inscrire à une éventuelle loi de finances rectificative votée avant l’automne emporte notre entière adhésion.

Dans le contexte actuel de finances publiques contraintes liées aux exigences d’assainissement budgétaire et d’efforts de réduction de la dépense publique conformément aux règles budgétaires et aux engagements européens de la France, nous sommes conscientes qu’une telle mesure, représentant une perte de recettes fiscales pour le budget de l’État, doit voir sa mise en place encadrée et compensée.

Sur cette base, nous serions honorées, Monsieur le Ministre, que vous nous accordiez une audience, au cours de laquelle nous vous proposerions d’aborder les points suivants :

  1. Présenter nos convictions et arguments en vue d’une inscription prochaine en LF (initiale ou rectificative)
  2. Réfléchir aux modalités de mise en place de la mesure
  3. Prendre connaissance des conseillers (ères) techniques au cabinet

 

Nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre très haute considération,

 

                                                                                                                Le collectif Georgette Sand

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  1. Comment des collectifs de féministes ont fait ployer Bercy : Knowckers - 19 avril 2016

    […] Le marketing genré (de l’anglais gender marketing) consiste à différencier des produits selon le sexe du consommateur final. Cette distinction peut se traduire par une différence notable de prix entre deux articles similaires (par exemple, différence uniquement au niveau du packaging). Depuis au moins 2014, des publications anglophones s’insurgent contre le surcoût financier qu’engendre cette pratique pour les femmes (apparition de l’expression Woman Tax). La qualité de « première nécessité » réclamée Par glissement, des pétitions se focalisent sur le budget représenté par l’acquisition des protections périodiques féminines. L’une de ces pétitions électroniques est lancée en juin 2014 au Royaume-Uni. En souhaitant faire reconnaître la qualité de produit de première nécessité aux protections périodiques féminines, elle exige le passage à un taux de TVA réduit. Inspirés par ces exemples, des associations et collectifs féministes tentent d’interpeller dès la fin de la même année le Gouvernement français. Malgré des appels répétés jusqu’à la mi-2015 (en particulier une « lettre aux Ministère des finances et des comptes publics »), la démarche est sans résultat. […]